Le rapport de durabilité comme catalyseur de la croissance stratégique

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  • Insight
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  • 03/06/25

Les rapports de durabilités évoluent : au-delà d'une simple case à cocher réglementaire, ils deviennent un véritable moteur de la stratégie d'entreprise. Les propositions du train de mesures omnibus de l'UE peuvent offrir un répit temporaire, mais les exigences des marchés, des investisseurs et de la société ne cessent d’augmenter. Les entreprises qui agissent dès maintenant peuvent bénéficier d’un avantage concurrentiel en matière de transparence, de résilience et de création de valeur à long terme.

Petra Schwick

Petra Schwick

Partner, Assurance, PwC Switzerland

Konstantin Meier

Konstantin Meier

Director, Sustainability and Climate Change, PwC Switzerland

Les récentes propositions omnibus de la Commission européenne accordent aux entreprises une certaine flexibilité dans le paysage exigeant du reporting sur la durabilité. En reportant des exigences clés liées à la directive sur les rapports de durabilité des entreprises (CSRD), à la taxonomie verte de l'UE et à la directive européenne sur le devoir de diligence des entreprises en matière de développement durable (CSDDD), ainsi qu’en ajustant le champ d'application pour certaines organisations, la feuille de route réglementaire a été recalibrée. Bien que les obligations principales en matière de reporting restent en place, et que l'assurance continue à jouer un rôle central, cette évolution crée une opportunité inédite : les entreprises ont désormais la capacité d’améliorer leurs performances en matière de durabilité et de qualité de leurs données.

Plutôt que de considérer le reporting de durabilité comme un fardeau réglementaire, les organisations peuvent le transformer en un levier stratégique pour stimuler leur performance et leur croissance. Elles peuvent investir dans des structures de gouvernance, des systèmes de données et des cadres de gestion des risques qui garantissent des informations fiables. Il ne s'agit pas seulement de remplir les exigences d'aujourd'hui, mais aussi de se préparer aux attentes de demain des régulateurs, des marchés et de la société. C'est une occasion de dépasser la simple conformité et de poser les bases de modèles d'entreprise résilients et adaptés à l'avenir.

De la réglementation aux attentes : la nouvelle responsabilité

Bien que les délais réglementaires aient été prolongés, les entreprises doivent toujours faire face à des attentes croissantes de la part d'un large éventail de parties prenantes. Les clients cherchent de plus en plus à s'aligner sur les principes de la CSRD. Les investisseurs et les institutions financières prennent désormais en compte les performances en matière de durabilité dans leurs décisions d'allocation de capital et de financement, récompensant souvent les entreprises qui fournissent des informations transparentes et crédibles par de meilleures conditions d’investissement. Parallèlement, des références solides en matière de développement durable deviennent un élément clé pour attirer et retenir les talents, sur un marché du travail de plus en plus compétitif - notamment auprès des jeunes générations, qui privilégient les employeurs engagés et les produits respectueux de l'environnement.

De plus, les conseils d'administration sont de plus en plus tenus responsables de la gestion des risques climatiques, sociaux et liés à la chaîne d'approvisionnement. Dans ce contexte, le développement durable n'est plus un sujet secondaire ; il est devenu central pour l'entreprise et a des implications sur sa réputation, ses obligations légales et ses finances. Un récent rapport suisse sur les litiges ESG illustre cette évolution en mettant en lumière l'exposition juridique croissante à laquelle sont confrontées les entreprises et leurs conseils d'administration. Les responsabilités potentielles en vertu du droit civil, pénal et administratif suisse peuvent découler de violations environnementales, de violations des droits de l'Homme et de manquements en matière de gouvernance. Pour atténuer ces risques, les entreprises doivent instaurer une gouvernance d'entreprise solide, produire des rapports transparents, et adopter des stratégies proactives de gestion des risques - non seulement pour se conformer à la réglementation, mais aussi pour gérer un risque juridique et opérationnel plus large. Le message est clair : un leadership responsable requiert de traiter les risques liés au développement durable avec la même discipline que n'importe quel autre risque stratégique ou financier.

Le développement durable au service de la gestion des risques de l'entreprise

Concernant les risques climatiques, les entreprises doivent évaluer comment les impacts physiques et liés à la transition pourraient affecter leurs opérations, leurs chaînes d'approvisionnement et leur base d'actifs afin de protéger leur modèle économique. Par exemple, des événements climatiques tels qu’une inondation sur un site de production peut perturber la logistique et les chaînes d'approvisionnement, déclenchant potentiellement des effets en cascade sur les processus de création de valeur, avec des conséquences financières significatives. À mesure que les risques climatiques s'intensifient, les primes d'assurance pour certains actifs physiques peuvent augmenter considérablement - ou ces actifs peuvent même devenir inassurables - forçant les entreprises à envisager de délocaliser leurs usines ou de restructurer leurs processus de production.

Les analyses de scénarios peuvent aider à anticiper ces risques, à évaluer les résultats possibles et à explorer les options de réponse avant que les perturbations ne surviennent. Comprendre l'exposition aux risques climatiques physiques permet aux entreprises d'adapter leurs opérations à temps et d'éviter des pertes potentiellement graves. De même, suivre les fluctuations de la tarification du carbone, les profils d'émission et les dépendances aux matières premières essentielles – tout en identifiant des matériaux viables dans une économie à faible émission de carbone peut engendrer des ajustements opportuns dans la conception de produits ou les stratégies d'approvisionnement, renforçant ainsi la résilience et la compétitivité à long terme.

De l'atténuation des risques à l'innovation commerciale

Au-delà de l'atténuation des risques, les entreprises qui intègrent la durabilité dans leur stratégie peuvent découvrir de nouvelles opportunités de croissance en repensant leurs offres et en adoptant des modèles complexes - en transformant leurs portefeuilles de produits vers des options plus durables et circulaires. Il ne s'agit pas seulement d'un enjeu environnemental, mais également économique. En intégrant la durabilité, les organisations peuvent explorer de nouveaux marchés, développer des modèles commerciaux adaptés aux enjeux futurs et se démarquer grâce à des propositions de valeur axées sur l'objectif. Plutôt que de réagir à la pression, elles façonnent activement leur rôle dans une économie aux ressources limitées.

Ce changement nécessite un leadership déterminé. Les conseils d'administration et les équipes de direction doivent veiller à ce que les enjeux de durabilité soient intégrés dans la planification stratégique, la gestion des performances et la prise de décision à l'échelle de l'entreprise, plutôt que d’être considérés comme des processus annexes. Alors que le contrôle sur la responsabilité s’intensifie, la qualité de la gouvernance devient un élément clé de différentiation. Les entreprises doivent être en mesure de prouver qu'elles sont conscientes des enjeux et qu’elles agissent en conséquence.

Une fenêtre pour une action stratégique

Malgré - ou à cause de - l'assouplissement temporaire de la pression réglementaire, le rapport de durabilité ESG demeure un outil essentiel pour les entreprises. Il facilite l’alignement des priorités internes, permet de prendre des décisions éclairées et rend les progrès visibles. Les organisations qui établissent des rapports efficaces ne se contentent pas de répondre aux exigences de divulgation : elles améliorent la prise de décision, stimulent les performances et alignent leurs équipes sur des objectifs communs. Si une assurance limitée peut suffire pour l'instant, les parties prenantes exigent de plus en plus des données fiables, vérifiées de manière indépendante. Investir dès maintenant dans la qualité des données, dans les systèmes et la gouvernance garantit non seulement la conformité future, mais renforce également la résilience et optimise le positionnement stratégique.

Ce n'est pas le moment de faire une pause. Il est temps de passer d'une conformité réactive à une création de valeur proactive. Cela signifie:

  • identifier des risques et des opportunités cruciaux
  • intégrer le reporting sur la durabilité dans la stratégie, la gouvernance et les opérations quotidiennes
  • renforcer l'infrastructure de données et de reporting
  • réaliser des analyses de scénarios pour informer de la planification des activités
  • réduire les risques de litiges grâce à des pratiques commerciales responsables et durables
  • renforcer la transparence et le dialogue avec les parties prenantes
  • développer des produits et des modèles d'entreprise innovants pour une économie zéro émission nette et circulaire

Finalement, les entreprises qui s’engagent dès maintenant ne se contenteront pas d’anticiper la réglementation : elles seront mieux équipées pour gérer l'incertitude, gagner la confiance des parties prenantes et établir des modèles d'entreprise apportant une valeur durable dans un monde en constante évolution.
 

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