La société en commandite de placements collectifs (SCPC) devient-elle plus intéressante pour les placements dans des valeurs immobilières et d’infrastructure ?

Dr. Jean-Claude Spillmann Partner, Head Asset & Wealth Management and Banking Regulatory, Legal, PwC Switzerland 08 juin 2021

La société en commandite de placements collectifs (SCPC) est un placement collectif suisse qui convient pour des investissements dans des biens immobiliers et des infrastructure. Bien qu’elle ait initialement été utilisée pour certains projets immobiliers suite à son introduction dans le droit suisse le 1er janvier 2007, elle n’a ensuite été que très peu été utilisée pour ce type de projets. Grâce aux adaptations du droit des placements collectifs entrées en force au 1er janvier 2020, la SCPC jouit d’un regain d’attractivité pour les placements dans les biens immobiliers et d’infrastructure.

Véhicule de placement pour des projets immobiliers, de construction et d’infrastructure

La SCPC est un véhicule de placement fermé, réglementé par la FINMA, qui permet des investissements dans des projets immobiliers, de construction et d’infrastructure. Fermé signifie que les investisseurs n’ont pas le droit de demander le rachat en tout temps de leurs parts à la valeur nette d’inventaire. En revanche, la durée d’une SCPC est en principe limitée – une durée fixe avec diverses des possibilités de prolongation est généralement prévue. Dans une SCPC, une société anonyme suisse assume le rôle d’associé indéfiniment responsable et les investisseurs celui de commanditaires. L’associé indéfiniment responsable est chargé de la gestion de la SCPC et est indéfiniment responsable. Les commanditaires ou les investisseurs ont, en revanche et dans une large mesure, un rôle passif. Leur responsabilité est limitée au montant de leur commandite. En contraste avec les fonds immobiliers, plus courant, la SCPC n’est soumise qu’à très peu de restrictions en matière de placement. Il n’existe notamment pas de prescriptions en matière de diversification.

Si les décisions de placement ne sont pas déléguées, l’associé indéfiniment responsable les prend lui-même. Il n’est toutefois soumis à aucune obligation d’autorisation séparée en vertu de la loi sur les établissements financiers (LEFin). Comparé à un placement collectif étranger, la SCPC peut dès lors s’avérer avantageuse pour une start-up suisse. Si celle-ci devait opter pour un placement collectif étranger, une autorisation selon la LEFin serait alors nécessaire en cas de délégation des décisions de placement en Suisse et ce indépendamment de l’étendue de la fortune gérée et de la réglementation du véhicule à l’étranger.

Du point de vue fiscal, la SCPC est traitée de la même façon que les placements collectifs ouverts (fonds de placement contractuel et SICAV). En d’autres termes, cela signifie que la SCPC est en principe fiscalement transparente et qu’il n’y a pas d’imposition des bénéfices au niveau de celle-ci. Les bénéfices et les revenus sont imputés directement aux investisseurs et doivent être déclarés par ces derniers (pas de double imposition). Si la SCPC détient des immeubles en propriété directe, elle est soumise à l’impôt sur le revenu et le bénéfice provenant de ces derniers à un taux réduit de 4,25 %. Les revenus et le bénéfice provenant d’immeubles en propriété directe soumis à l’impôt au niveau de la SCPC ne sont plus, en cas de distribution à des investisseurs suisses, imposés auprès de ces derniers.

Nouveautés au 1er janvier 2020

Avec l’entrée en vigueur de la loi sur les établissements financiers (LEFin) et de la loi sur les services financiers (LSFin), diverses adaptations ont également été apportées à la loi sur les placements collectifs (LPCC) et à l’ordonnance sur les placements collectifs (OPCC). La plupart de ces adaptations sont en lien direct avec la LEFin et la LSFin. En revanche, certains changements relatifs à la SCPC n’ont pas de rapport direct avec la LEFin et la LSFin et n’ont rencontré que peu d’attention jusqu’à présent :

  • Placements dans l’immobilier et les infrastructures

    ·         Jusqu’ici, la SCPC pouvait investir dans des projets immobiliers, de construction et d’infrastructure. En raison des caractères fermé et de durée limitée de la SCPC, seules entraient en ligne de compte les biens immobiliers et d’infrastructure pouvant être développées et ensuite liquidées, c’est-à-dire qui étaient généralement vendus une fois terminés (caractère de projet). La détention d’immeubles sans (autre) intention de développement, comme c’est habituellement le cas avec un fonds immobilier, n’était jusqu’ici pas possible .
    Désormais, l’art. 121, al. 1, let. d, OPCC autorise également d’autres placements, notamment dans des biens immobiliers et des infrastructures. Il ne devrait donc plus être indispensable que l’opération revête un caractère de projet. Il convient toutefois de noter que la SCPC est toujours un placement collectif fermé. Pour compenser l’absence de droit au remboursement des parts à la valeur nette d’inventaire, il faut en principe prévoir une durée limitée (avec des possibilités de prolongation correspondantes).
  • Acquisition et cession de valeurs immobilières et d’infrastructure
    Le 1er mars 2013, différentes dispositions ont été intégrées dans l’OPCC afin d’empêcher des entreprises de construction de fonder une SCPC dans le seul but de financer leurs propres projets immobiliers et de construction par le biais de cette SCPC, au lieu de réaliser des projets rentables de cette nature au profit des investisseurs de la SCPC. L’une de ces dispositions prévoit que les associés indéfiniment responsables, les personnes responsables de l’administration et de la direction des affaires et les personnes physiques ou morales qui leur sont proches, ainsi que les investisseurs d’une SCPC ne peuvent acquérir de celle-ci des valeurs immobilières et des valeurs d’infrastructure ou lui en céder.
    Le 1er janvier 2020, l’interdiction d’acquisition et de cession de valeurs immobilières et d’infrastructure a de nouveau été levée. Désormais, l’acquisition ou la cession est autorisée si un expert indépendant chargé de l’estimation confirme que le prix d’achat ou de vente des valeurs immobilières et des valeurs d’infrastructure ainsi que les coûts de transaction sont conformes à ceux du marché et si l’assemblée des associés a approuvé la transaction (art. 121, al. 4, OPCC). En revanche, le financement de projets de personnes qui sont directement ou indirectement liées aux associés indéfiniment responsables, aux personnes responsables de l’administration et de la direction des affaires ainsi qu’aux investisseurs est toujours interdit (art. 121, al. 3, OPCC).
    La levée de l’interdiction d’acquérir des valeurs de personnes proches ou de leur en céder permet désormais de transférer des projets immobiliers et de construction achevés d’une SCPC vers un autre véhicule (p. ex. un fonds immobilier) en vue d’une détention à long terme.
  • Un associé indéfiniment responsable pour plusieurs SCPC

    Jusqu’ici, une société anonyme (associé indéfiniment responsable) ne pouvait être active en qualité d’associé indéfiniment responsable que dans une seule SCPC. Désormais, la loi permet qu’une telle société assure le rôle d’associé indéfiniment responsable dans plusieurs SCPC, à condition qu’elle soit autorisée à opérer en tant que gestionnaire de placements collectifs (art. 98, al. 2, LPCC). Avec ce changement, la SCPC devient plus facilement modulable en fonction de l’organisation de sa structure. Ainsi par exemple, il est possible de commencer avec une première SCPC. Il faut à cet effet obtenir de la FINMA une autorisation du produit et une autorisation de l’établissement pour la SCPC, mais pas d’autorisation séparée au sens de la LEFin pour la société anonyme (associé indéfiniment responsable). Si des SCPC supplémentaires sont constituées par la suite, il est possible, comme jusqu’ici, de constituer une nouvelle société anonyme (associé indéfiniment responsable) pour chaque SCPC supplémentaire ou d’obtenir pour la société anonyme une autorisation en tant que gestionnaire de placements collectifs et d’utiliser cet établissement financier réglementé en tant qu’associé indéfiniment responsable de toutes les SCPC. L’avantage de cette option est que l’organisation interne de la SCPC n’a pas besoin d’être répliquée à plusieurs reprises.

En résumé, avec les adaptations entrées en vigueur le 1er janvier 2020 et compte tenu des changements découlant de la LEFin, la SCPC gagne en attractivité et devrait, de plus en plus, être considérée comme une option possible pour la structuration de placements collectifs dans le domaine de l’immobilier et des infrastructures.

Nous nous ferons un plaisir de vous accompagner lors de l’évaluation des options de structuration pour des placements collectifs dans des valeurs immobilières et des valeurs d’infrastructure, à la fois du point de vue réglementaire et du point de vue fiscal.

 

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Begga Sigurdardottir

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